L’Afrique a toujours cherché à planifier la mise en œuvre des réseaux intégrés d’infrastructures tant aux niveaux continental, régionale que national. Mais la réalité est palpable. Les investissements sans rétrocommissions et autres formes de corruption dans les domaines aussi variés que l’énergie, le transport, l’eau, les télécommunications et les technologies de l’information et de la communication sont légions. Les échanges n’arrivent pas véritablement à prendre un rythme de croisière. En effet, quand l’Afrique échange entre elle moins de 12 % des biens et services, c’est près de 65 % pour l’Union européenne.
L’Afrique des dirigeants autocrates ou des démocraties inachevées a donc opté pour une culture de l’opacité des contrats et du clientélisme y compris dans le pré-carré français. Cela a considérablement limité les résultats sur le terrain, même si personne ne peut affirmer que rien n’a été fait. Un nid de poule sur une route, c’est quelque amortisseurs que l’on doit changer. Mais un nid de poule sur une voie ferrée, c’est l’accident impardonnable car prévisible.
Le problème est que le déficit important en matière d’infrastructures de qualité en Afrique se solde par un niveau de performance logistique mauvais. Il est simplement plus difficile d’échanger par la voie routière, ferroviaire, aéroportuaire ou même maritime avec efficacité sur le continent. Quand ce ne sont pas les coûts prohibitifs, ce sont le non-respect de la liberté de circuler du fait des barrages et autres « check points » intempestifs où il faut glisser « quelque chose »… Un chantage non sanctionné, et parfois valorisé dès lors que cela n’empêche pas le pouvoir de se sentir menacer par une alternance ou un départ précipité communément dénommé « coup d’Etat ».
Les coûts des transactions grèvent les coûts de production et des services et conduit à une baisse de la compétitivité totale pour faire des affaires sans petite ou grande corruption en Afrique. La vision existe, mais les dirigeants africains s’évertuent à toujours continuer à aller chercher les financements et l’exécution par des voies de sous-traitance. Si auparavant dans la zone francophone, c’était les grandes sociétés françaises, aujourd’hui, ce sont surtout les pays émergents dont la Chine. Mais, les responsabilités africaines ne doivent pas être évacuées.
A côté des lobbies et entreprises non africaines qui offrent des « cadeaux » au pouvoir et son réseaux, des groupes de pression et des sociétés clientélistes africains naviguant eux-aussi autour des pouvoirs et gouvernants locaux se sont spécialisés dans l’octroi des contrats dans le domaine de l’infrastructure et se voient confier entre 10 % -et 30 % des travaux. Il s’agit d’une discrimination positive qui ne sanctionne que le peuple tant la médiocrité et le manque d’efficacité brillent au soleil.
Mais quand ces contrats sont attribués avec des appels d’offres opaques ou des gré à gré non justifiés à des structures trop souvent incompétentes du fait justement des rétrocommissions exigées pour obtenir le contrat, -le tout sous la couverture officielle et parfois ésotérique de l’impunité totale-, alors il ne faut pas s’étonner que même la Chine commence à sortir de sa légendaire « neutralité » pour questionner certains dirigeants africains qui leurs avaient promis de respecter les clauses des contrats et se retrouvent sur la liste « jaune » des corrompus africains.
Le cas de l’accident ferroviaire au Cameroun est symptomatique de la capacité des Etats africains à se taire dans le silence alors que dans n’importe quel pays démocratique, le concessionnaire ne pouvait pas échapper à une procédure judiciaire pour responsabilité sans fautes ou plus en attendant les conclusions d’une enquête indépendante. Mais la lâcheté ne semble plus être un facteur de honte. Alors tous tentent indirectement de rendre le conducteur responsable pour vitesse excessive. Bref, le silence coupable des dirigeants africains ne pourra pas durer éternellement. YEA.
28 octobre 2016
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